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Comment Saint François, quand il vint à passer de cette vie, bénit le saint frère Bernard et le laissa son vicaire.

 

t il lui montra bien, non seulement pendant sa vie, mais encre à sa mort. Car saint François, à l'approche de la mort, tel le saint patriarche Jacob, comme ses dévots fils l'entouraient, affligés et éplorés du départ d'un père si aimable, demanda: « Où est mon premier-né ? Viens à moi, mon fils, pour que mon âme te bénisse avant que je meure. » Alors frère Bernard dit en secret à frère Élie, qui était Vicaire de l'Ordre: Père, va à la main droite du Saint pour qu'il te bénisse. » Et frère Élie s'étant placé à sa droite, saint François, qui avait perdu la vue pour avoir trop pleuré, posa la main sur la tête de frère Élie: « Ce n'est pas la tête de mon premier-né Bernard. »

 

 

Mort Saint François - Giotto 1325

 

 

Alors frère Bernard alla près de la main gauche, et saint François alors fit comme un treillis de ses bras en croix, et posa la main droite sur la tête de frère Bernard, et la gauche sur la tête du dit frère Élie, et il dit à frère Bernard: « Que le Père de Notre-Seigneur Jésus-Christ te bénisse de toute bénédiction spirituelle et céleste dans le Christ, comme tu es le premier élu en cet Ordre saint pour donner l'exemple évangélique, pour suivre le Christ dans la pauvreté évangélique: car non seulement tu as donné tes biens et tu les as distribués entièrement et généreusement aux pauvres pour l'amour du Christ, mais encore tu t'es offert toi-même à Dieu dans cet Ordre en un doux sacrifice. Béni sois-tu donc par Notre-Seigneur Jésus-Christ, et par moi son pauvre petit serviteur, de bénédictions éternelles, en marche et en repos, dans les veilles et dans le sommeil, dans la vie et dans la mort. Qui te bénira sera comblé de bénédictions, et qui te maudirait ne resterait pas sans punition. Sois le maître de tous les frères, et que tous le frères obéissent à ton commandement; aie licence de recevoir dans cet Ordre et d'en chasser qui tu voudras; qu'aucun frère n'ait autorité sur toi, et qu'il te soit permis d'aller et de demeurer où il te plaira. »

Après la mort de saint François, les frères aimaient et révéraient frère Bernard comme un père vénérable. Et comme il approchait de la mort, beaucoup de frères vinrent à lui de diverses parties du monde; parmi eux vint ce séraphique et divin frère Gilles, qui voyant frère Bernard, dit en grande allégresse: «  Haut les coeurs, frère Bernard, haut les coeurs ! » Et le saint frère Bernard dit en secret à un frère de préparer à frère Gilles un lieu propre à la contemplation, et ainsi fut fait.

Et quand frère Bernard fut à l'heure suprême de la mort, il se fit redresser et parla aux frères qui l'entouraient, disant: « Mes frères bien-aimés, je ne veux point vous dire beaucoup de paroles; mais vous devez considérer que l'état religieux où j'ai vécu, vous y vivez, et que l'état où je suis maintenant, vous y serez aussi. Et je découvre ceci dans mon âme que, pour mille mondes égaux à celui-ci, je ne voudrais pas ne pas avoir servi Notre-Seigneur Jésus-Christ et vous. Je vous supplie, mes frères bien-aimés, de vous aimer les uns à les autre. » Et après ces paroles et d'autres bons enseignements, il se recoucha sur son lit; son visage devint extraordinairement resplendissant et joyeux, ce dont tous les frères s'émerveillèrent fort; et au milieu de cette joie son âme très sainte, couronnée de gloire, passa de la vie présente à la vie bienheureuse des anges.

À la louange et à la gloire du Christ. Ainsi soit-il.